Célestin Freinet – pédagogue engagé et innovant

L’école du peuple : l’avenir scolaire selon Freinet

Connu et reconnu aujourd’hui, Freinet est à l’origine d’un mouvement scolaire qui a laissé ses traces. Ses écoles existent encore et il fait parti de ces pédagogues dont les innovations sont mises en pratique et qui constituent souvent une alternative à l’école « traditionnelle ». Mais son engagement n’était pas seulement d’ordre pédagogique : la politique tenait aussi une grande place dans son système, sensible qu’il était au sort des « petits prolétaires ».

 

  • Le parcours d’un combattant… pacifiste

 

Célestin Freinet est diplômé dès 1913 de l’Ecole Normal d’instituteurs de Nice, mais il n’a pas encore le temps de pratiquer le professorat que déjà le voilà mobilisé en 1915, alors que la guerre éclate en Europe. Blessé au poumon, il gardera toute sa vie des séquelles physiques, mais aussi bien psychologiques de cette période. Il est désormais pacifiste… et se retrouve pour la première fois devant une authentique classe, en milieu populaire. Pour lui, pas question de perpétuer le modèle d’avant-guerre, auquel il impute en parti la responsabilité du drame de 14-18. La société de demain, qu’on espère pacifiée, devra découler d’un système éducatif renouvelé, d’une logique autre – marquée par l’altruisme et la coopération.

Mais si Freinet est instituteur, il est aussi un militant communiste. A vrai dire son engagement connaît une évolution parcourue de remises en cause, non pas de la doctrine communiste elle-même à laquelle il est toujours très attachée, mais de la pratique des partis qui la portent. Quoiqu’il en soit, communiste et pacifiste, le voilà qui se retrouve à devoir gérer une classe. Et ce qu’il constate est pour lui déplaire grandement : les locaux sont vétustes, les enfants lui viennent de familles pauvres, ces difficultés financières les empêchent de réussir leur scolarité de la même manière qu’un enfant de classe bourgeoise. La conclusion est sans appel : puisque ces enfants se trouvent dans une situation exceptionnelle, il faut ajuster l’école en fonction de leur milieu.

  • Contre l’école traditionnelle

 

Si au départ, le pédagogue n’est pas très sûr de ce qu’il faut faire, en revanche il a une claire idée de ce qu’il faut absolument éviter. L’école traditionnelle tombe deux fois en disgrâce à ses yeux : elle ne convient qu’à une population privilégiée et elle ne produit pas une véritable morale – preuve en est qu’une guerre s’est déclarée ; l’enseignement traditionnel, basé sur la transmission des savoirs du maître à l’élève, a failli. La culture seule ne suffit pas à prévenir la « méchanceté » dont est capable l’homme. Aussi Freinet se rit-il de la prétention de l’école à produire des citoyens éclairés. Sous des dehors humanistes, c’est bien plutôt un ordre économique et social qu’elle veut préserver ; c’est une école capitaliste qui ne réussit qu’à reproduire les inégalités qu’il constate par lui-même.

« Nous sommes au service des enfants, au service de la société pour laquelle nous voulons les préparer », déclare-t-il. Pour commencer, il s’agira de supprimer tout ce qui fait, à ses yeux, de l’école traditionnelle une école aliénante. Suppression des manuels et du cours magistral. Suppression de l’estrade, car le professeur doit apprendre à descendre au niveau de l’élève. Suppression du « hiatus » que l’école induit : ce que Freinet appelle « hiatus », c’est ce fossé qui sépare l’école du reste de la société. Ainsi tout ce qui fait la vie affective de l’enfant, n’a pas sa place dans l’école. Freinet procède à l’inverse, et invite au contraire les enfants à s’exprimer sur leur quotidien ; cela lui permet de constater leurs conditions de vie, mais également de faire de la rédaction un exercice plaisant, en tout cas intéressant. Car, si Freinet ne se place pas lui-même dans le mouvement de l’Education Nouvelle, il en partage l’idée essentielle selon laquelle c’est l’intérêt qui motive l’enfant dans ses apprentissages.

  • Le jeu et le travail

 

Freinet exposera dans son ouvrage, L’éducation du travail, sa conception de l’importance du jeu et du travail chez l’enfant. C’est que l’enfant, pour lui, est naturellement tourné vers le travail. Ses jeux d’imitation ou de rôle, ses poupées dont il prend grand soin, tous ses jeux en réalité ne montreraient qu’une chose : l’enfant a besoin d’agir, son action a besoin d’être motivée, et c’est l’adulte, lorsqu’il ne comprend pas ce besoin et qu’il l’empêche d’accéder au travail, qui le contraint à se tourner vers ce succédané qu’est le jeu.

Il faut donc que les activités que propose l’école s’accordent avec ce besoin de motivation. C’est pourquoi Freinet suggère de mettre en place plusieurs ateliers qui permettront aux enfants de mener à bien un projet. Et quel sera le rôle du professeur ? Il organisera le travail, observera et supervisera au besoin le travail de l’un où l’autre, non pour se substituer à l’élève, mais pour rectifier ses erreurs. Quant à la discipline, Freinet redéfinit ce mot : la discipline, c’est l’état naturel d’un enfant, lorsque ce dernier aime son activité et qu’il veut la mener à bien. Jusqu’à la fin, il fera tous les gestes qu’il faut, ira chercher toutes les informations nécessaires.

Le pédagogue a mis bien d’autres projet en place, dont la fameuse imprimerie à l’école, et la correspondance entre classes Freinet. Il avait à cœur de respecter le rythme de chaque enfant, comme en témoigne la pratique de la lecture, qui était individuelle. Son épouse Elise Freinet qu’il rencontre en 1925, institutrice puis artiste, l’accompagnera et le soutiendra, et racontera leur expérience, entre autre dans L’Itinéraire de Célestin Freinet.

Celestin Freinet

YR pour l’Association Oze

www.oze-coaching.fr

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