Alphabet : un film-réflexion sur le système scolaire actuel

Erwin Wagenhofer signe avec Alphabet, sorti en 2013, un film concluant la trilogie commencé avec We feed the world et Let’s make money. N’ayant pas regardé ces deux derniers, je ne parlerais que d’Alphabet, qu’il a conçu, explique-t-il, comme une tentative de réponse aux questions qu’ont soulevés.en lui les constats faits après ses deux premiers films. Un documentaire qui replace l’école au cœur de la société et donne à entendre des.voix singulières et riches d’enseignements.

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La compétition : partout, tout le temps

D’emblée l’accent est mis sur la corrélation entre l’ouverture économique des.pays industrialisés au marché international et la compétition qui va grandissante au sein des écoles de ces pays. Le film opère notamment des allers-retours entre le cas chinois et allemand. Quelques intervenants sont Espagnols, Franco-allemands ou Britanniques ; le propos considère en tout cas l’expansion du modèle éducatif occidental en lien avec les enjeux économiques contemporains. alphabet, ensuite

Il semble en effet que l’on ne puisse parler de l’un sans l’autre. Car non seulement les enfants font les frais d’une compétition scolaire au sein de leurs établissements respectifs, mais cette compétition atteint une dimension internationale, comme l’illustre bien le rapport PISA, triennal et chargé de présenter les résultats scolaire des pays de l’OCDE en matière de lecture, de mathématiques et de sciences. Quelles sont les méthodes d’enseignements des pays qui se retrouvent en tête de classement est une question qui se pose pourtant ; réussir oui, mais à quel prix ? alphabet, ensuite

Yang Dongping enseigne la pédagogie à l’Institut de Technologie de Beijing, et est engagé dans l’analyse et la critique du système scolaire chinois. S’alarmant des effets de plus en plus souvent dramatiques d’une instruction qui ne tient.aucun compte des besoins fondamentaux de l’élève, il voit d’un très mauvais œil l’organisation des Olympiades des Mathématiques, ces grands concours ad hoc qui engagent les élèves dès le primaire. Source de stress et de fatigue, car l’excellence requiert un rythme.soutenu et chaque moment de faiblesse est au désavantage de l’élève. Ces méthodes qui tablent sur un travail acharné et robotique s’inscrivent de fait, comme le note le pédagogue, dans une logique contraire à la nature infantile. alphabet, ensuite

Tant psychologiquement que physiquement, l’accumulation de fatigue et la pression constante deviennent pour certains.d’entre les élèves intenables. Les statistiques concernant le suicide de cette population lors.des examens d’entrée ne cessent de connaître une augmentation régulière.

 

L’école et la créativité : quid des capacités de l’enfant ?alphabet

Si bien que l’on est fondé à se demander si c’est pour le bien de l’enfant que l’instruction moderne est dispensée, ou pour celui du marché. Thomas Sattelberger ne manque pas de souligner à quel point il peut être effrayant.de constater l’évolution de nos sociétés suivant des critères purement économiques. C’est une voie bien étriquée que l’on emprunte ; et qui étrique en retour les jeunes esprits. alphabet, ensuite

Le film évoque ainsi l’édifiante expérience menée.afin de mesurer la capacité des individus à mobiliser la « pensée divergente », une forme de rapport aux problèmes qui n’est pas la créativité.mais qui est « une faculté essentielle pour pouvoir être créatif ». C’est en fait une capacité qui « permet de trouver différentes réponses à une question et d’interpréter celle-ci de plusieurs façons », un mode de pensée « non-linéaire » et « pluridimensionnelle », donc. Un même groupe d’individus a ainsi été testé à.trois étapes différentes de sa croissance (dès 3 ans jusqu’à 15 ans) ; les résultats ont montré que l’on passe de 98% de personnes atteignant le niveau génial à 10% en fin d’expérience. Ajoutons qu’un groupe contrôle d’adultes âgés de 20 ans et.plus n’atteint plus qu’une proportion de… 2%. alphabet, ensuite

Ne doit-on pas alors remarquer avec Erwin Wagenhofer.que le point commun entre tous ces individus, malgré des divergences dues à des parcours de vie différents, reste le passage par l’éducation qu’ils ont reçus ? Le fait est, rappelle-t-il, qu’à l’école, l’élève apprend qu’il n’y a qu’une seule bonne réponse. alphabet, ensuite

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Les petits espoirs alphabet

Le film ne souhaite d’ailleurs pas charger la profession.enseignante de ce caractère paradoxalement anti-éducatif. C’est la nature de l’enseignement qui est ainsi faite ; oui, mais comment en est-on arrivé là ? Des exigences économiques ont gangréné la chose, a-t-on dit. Pour le neurobiologiste Gerald Hüther, l’école telle que nous la connaissons est le résultat d’une Histoire marquée par la peur, les guerres et l’exigence d’y faire face. Economie ou guerre, c’est toujours la même histoire. Selon lui, l’école a d’abord été pensée pour produire des personnes pouvant « fonctionner » correctement ; des personnes aux normes pour ainsi dire. alphabet, ensuite

Le même Gerald Hüther fait part de sa conviction selon laquelle.« il est impossible d’éduquer quelqu’un, on ne peut que l’inviter ». Suivant le concept « d’auto-organisation » voulant qu’on « ne peut pas éduquer une autre personne [car] c’est neurologiquement impossible », mais qu’elle doit au contraire « en avoir envie » ; et c’est, conclue-t-il, tout l’art d’éduquer. Un petit air de Freinet aux oreilles des connaisseurs ? Le pédagogue n’avait-il pas en effet pour ritournelle qu’on « ne fait pas boire le cheval qui n’a pas soif »…

Gerald Hüther fait partie de ces personnes qui tente à leur échelle.et dans leur domaine de donner à penser une autre vision de l’éducation ; une (ou des !) voie(s) de sortie non seulement sont possibles mais deviennent urgentes à prendre en considération. Le cycle d’étude tel qu’il existe aujourd’hui épuise les élèves et la voix de Yakamoz Karakurt est précieuse.qui se fait entendre pour dénoncer le rythme et le poids des programmes scolaires. Cette jeune élève avait écrit à l’époque une lettre ouverte sur ce sujet. Et si tous, nous écoutions ce que les premiers concernés ont à nous dire ? alphabet, ensuite

Alphabet a peut-être ce mérite, quoiqu’il en soit, de montrer que s’interroger sur l’école, c’est aussi s’interroger sur la société, non seulement contemporaine, mais dans son évolution historique ; tirons-en quelques enseignements. alphabet, ensuite

 

 

 YR pour l’Association Oze

https://educationpositive-oze.fr/dewey-ecole-et-democratie/
https://educationpositive-oze.fr/category/nblog/scolarite/page/2/

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