De plus en plus de femmes souhaitent accoucher à domicile. L’accouchement à domicile est cependant marginalisé en France alors que dans le monde 90% des femmes accouchent à la maison. Nous allons tenter ici de répondre à vos questions et lever le voile sur une pratique très discriminée à notre époque.
Pourquoi choisir l’accouchement à domicile?
Choisir d’accoucher à domicile est d’abord une affaire de couple.
Une multitude de raisons peuvent porter les mamans à engager l’accouchement hors de l’enceinte hospitalière. Ce n’est pas un choix marginal puisqu’il concerne toutes les catégories socioprofessionnelles.
Voici les principales raisons évoquées par ces mères de famille:
– besoin d’intimité pour vivre ce moment pleinement
– besoin de redonner une place au papa lors de la naissance
– rechercher de la sécurité et de l’écoute lorsqu’une première naissance s’est mal passée
– prendre son temps
– désir de faire naître le bébé dans un environnement familier et rassurant.
Quelles sont les conditions permettant l’accouchement à domicile?
Accoucher à domicile n’est possible que pour les femmes qui vivent une grossesse dite « physiologique » c’est à dire sans aucun problème de santé pour elle et dans le développement du bébé.
Evoquons quelques critères médicaux qui peuvent nécessiter un accouchement en milieu hospitalier : un diabète gestationnel, l’hypertension, les troubles de coagulation du sang, un bébé prématuré, l’accouchement de plusieurs enfants, un bébé se présentant en siège, le souhait d’une péridurale.
Comment organiser l’accouchement à domicile?
L’accouchement à domicile est certes un choix accessible mais il faut le préparer ! En effet, il existe quelques incontournables :
la première chose à faire, le plus rapidement possible, c’est de trouver une sage-femme libérale pour vous accompagner. La méthode du bouche à oreille peut être très utile pour faire le bon choix.
Ne pas perdre de vue que le suivi de la grossesse est le même que pour l’accouchement en structure médicale : prises de sang, analyses d’urine, contrôle de l’indice glycémique, etc…
Les cours de préparation sont essentiels pour confirmer ou invalider votre envie d’accoucher à domicile. Si avant la naissance vous êtes traversée par des doutes cela peut ralentir ou contrarier le bon déroulement de ce moment. Il y a également la préparation pour le jour J. Ces cours vont lever le voile sur les différentes phases que sont le travail, l’expulsion et la délivrance. Détailler ces mécanismes corporels aide le couple à vivre le travail en toute conscience.
Se familiariser avec le fait qu’on devra faire face à la douleur et s’y préparer. Quelques astuces sont proposées par les sages femmes pour s’en sortir avec brio : créer une ambiance agréable dans la maison, préparer une playlist, ne pas se priver de douche ou de bain chaud, se faire masser le périnée et le bas du dos, employer des techniques de visualisation, faire l’amour, se reposer, etc…
Pour parer à toutes les éventualités, y compris les plus négatives, il est utile de s’inscrire à l’hôpital ou à la maternité la plus proche ainsi qu’un rendez-vous avec un anesthésiste.
Que fait-on le jour de l’accouchement?
Il faut préparer tout le matériel médical dont la sage femme aura besoin : bâche en plastiques, alèses, sacs poubelles, une bassine, etc…
Ne pas négliger également les bienfaits de l’eau pendant le travail. Si la baignoire n’est pas assez grande, vous pouvez opter pour la piscine.
Quels sont les risques d’un accouchement à domicile?
Les couples qui se lancent dans la belle aventure de l’accouchement à domicile doivent savoir que jusqu’à ce que le bébé soit effectivement né, rien ne garantit qu’il puisse être accueilli au domicile de ses parents. Plusieurs raisons peuvent contrarier l’issue de l’accouchement : une précédente naissance par césarienne, une trop grande prise de poids, si pour un précédent bébé vous avez eu une hémorragie, si le bébé est en siège jusqu’à la fin, en cas de placement inhabituel du placenta, et d’autres…
Les raisons d’un transfert en maternité ne doit pas être vécu comme une fatalité mais plutôt accepté avec bienveillance pour vivre l’accouchement sereinement.
Et maintenant laissons place au témoignage de Nathalie, maman de deux enfants, qui a fait le choix de l’accouchement à domicile pour son second accouchement.
Pourquoi avoir choisi l’accouchement à domicile ?
Depuis toujours je savais que je ne voulais pas accoucher à l’hôpital car j’entendais des histoires terrifiantes sur l’accouchement. Rien que de penser au mot épisiotomie je n’avais pas envie d’y mettre les pieds… en toute connaissance de cause, qui aurait envie de faire ça ??? Je trouve que l’hôpital est un milieu angoissant et froid. Le système est complètement déshumanisé, les mamans enceintes y sont traitées comme des objets qui doivent suivre une procédure, un peu comme à l’usine.
C’est à contre-cœur que j’ai accouché de ma première fille à l’hôpital. Pour ma première grossesse, j’ai été suivie par une personne différente à presque chaque rendez-vous, sans compter le nombre de fois où du personnel rentrait dans la pièce alors que j’étais en position gynécologique. J’ai ressenti un manque d’intimité total et un sentiment de vulnérabilité.
Bien que l’accouchement s’est « très bien passé » médicalement parlant, j’ai été terrorisée pendant tout l’accouchement à l’idée de ce qui allait m’arriver. Voici une liste non exhaustive de situations anxiogènes auxquelles j’ai été confrontée : la poussée en se faisant crier dessus, les grosses difficultés pour mettre en place l’allaitement, une équipe médicale qui se contredisait tout le temps et qui m’infantilisait. Ceci a été une souffrance énorme, tant physique que psychologique.
Pour rien au monde je ne souhaiterai revivre ces moments qui ont pourtant accompagné l’arrivée de ma fille. A l’époque, je savais que c’était possible d’accoucher à la maison en France mais la démarche me paraissait tellement compliquée que je ne m’en sentais pas les épaules pour « aller à contre courant ». J’étais déjà tellement tétanisée par l’idée d’accoucher (grâce au lavage de cerveau de la société qui fait croire aux femmes qu’accoucher est une chose effroyable et indiciblement douloureuse…) La sage femme qui me suivait à l’époque trouvait que j’étais beaucoup trop idéaliste sur la naissance et m’avait dit que la naissance était « forcément quelque chose de violent » et que je pouvais laisser tomber mon plan de naissance puisqu’en « choisissant une maternité, on choisit son équipe médicale et donc son protocole « …
Par ailleurs, la gynécologue qui m’avait suivie durant cette période m’avait expliqué que la douleur ressentie pendant l’accouchement était « la pire qu’on puisse imaginer, comme si on vous arrachait un bras ». Propos très rassurant pour une jeune maman comme vous pouvez l’imaginer !
Bref ! je déteste le discours médical, le manque d’humanité. Et les accouchements « alternatifs » type maison de naissance, accoucher dans l’eau, ou à la maison, me paraissaient beaucoup plus doux. Je regrette tellement que les mamans ne soient pas encouragées quand les conditions médicales le permettent de faire ce choix en France.
Surtout que ça coûterait beaucoup moins cher à la sécu alors c’est tout bénef !
Quel a été le rôle de ton conjoint? Etait-il convaincu également de l’intérêt d’un accouchement à domicile ?
Jérémy a rencontré la sage femme avec moi à chaque rdv et a apprécié le dialogue qui s’est établi avec elle. Il était aussi d’accord sur tout le discours contre la surmédicalisation à l’hôpital, et comme moi avait eu le sentiment d’être abandonné pendant le travail, à l’hôpital. Il avait confiance en la sage femme et avait prévu le côté pratique avec elle.
Les choses se sont accélérées plus vite que prévues, du coup j’ai accouché dans la piscine installée dans le salon à cet effet avant que la sage femme puisse se rendre chez nous ! C’est donc Jérémy et ma meilleure amie qui ont reçu le bébé et me l’ont délicatement fait passer entre mes jambes pour que je le serre contre moi. La sage femme est arrivée 20 mn plus tard. J’étais à 10 jours du terme, il était environ 23h30. Le travail a duré 2h. Mon bébé était en bonne santé. On peut dire que c’était une naissance éclair. Quel beau moment d’émotion pour moi et mon conjoint!
Comment as tu organisé ton accouchement à domicile ?
Il faut trouver une sage femme qui pratique l’accouchement à domicile et qui puisse vous suivre. Elles sont souvent très demandées car peu nombreuses, mais elles peuvent se déplacer de loin. Il faut prendre contact avec elle assez vite, pendant le premier trimestre, pour avoir le temps de faire connaissance, de constituer le dossier médical au fur et à mesure et de nouer avec elle une relation de confiance. Dans le cadre d’un accouchement à domicile, la sage-femme prend le temps (1h) de discuter de la grossesse et de l’accouchement avec le couple. Elle informe et rassure. Son rôle est très positif. Pour le grand jour, la sage-femme fournit une liste avec tout le matériel à avoir à disposition. De son côté, elle apporte tout le nécessaire du point de vue médical. Pour ma part, j’ai aussi loué une piscine d’accouchement sur les conseils de ma sage femme mais cela reste optionnel. Un mois avant la naissance, la sage-femme vient vous visiter à la maison pour faire ses repérages, connaître la route et donner ses conseils. Elle revient 15 jours avant l’accouchement pour s’assurer que tout va bien.
Malheureusement, en France, accoucher à la maison à un coût. A moins d’avoir une bonne mutuelle, il y a des dépassements d’honoraires pour les consultations et l’accouchement en lui-même. L’accouchement à domicile est remboursé 323€ par la sécurité sociale alors qu’à l’hôpital c’est minimum 2 000 €, avec la péridurale inclus, et ça peut grimper à plus de 10 000 € de remboursement si la grossesse et l’accouchement sont qualifiés de pathologiques. La prime de naissance nous a donc servi à payer le reste des honoraires pour la sage femme.
Quoiqu’il en soit, je trouve qu’accoucher librement et tranquillement à la maison, ça n’a pas de prix.
Encore une fois le choix d’accoucher à domicile doit être le fruit d’une mure réflexion en couple et surtout avec l’équipe médicale. Cette option comme nous avons pu l’évoquer précédemment ne peut pas convenir à toutes les mamans. La priorité étant bien entendu d’éviter tout risque psychologique et médical !
Seule ligne de conduite à tenir : accoucher en toute sécurité et sereinement.
Meera ALBRECHT pour l’Association Oze
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