« Parentalité positive » et « éducation bienveillante » sont, à juste titre, de plus en plus connues et reconnues pour aider parents, enseignants, éducateurs dans leur manière d’être et de faire avec les enfants, pour être au plus près de leurs besoins, et en adéquation avec leur développement. Et surtout pour favoriser les relations. Ce ne sont pas des dogmes,.mais une invitation à de nouvelles expériences et explorations dans nos manières d’être, de penser, et de faire. Ces nouvelles disciplines s’appuient sur les dernières découvertes.du fonctionnement neurologique humain pour comprendre les comportements des enfants en fonction.de leur âge et l’impact des attitudes des adultes sur leur développement. Sans nier les apports de la psychanalyse,.elle vient enrichir et complémenter ces approches grâce à un regard pragmatique et novateur. culpabilité
Cet article est issu de ma propre.expérience de parent et de thérapeute. En discutant avec mon entourage de l’éducation.dite « bienveillante », certaines personnes m’ont confié réagir à mes parutions ou à leurs lectures sur ce thème.par de la culpabilité, et pensant que me faisant fervente défenseuse de ce mouvement « j’étais tout le.temps zen,.ne me mettant jamais en colère après ma fille »… Etre un parent explorateur qui se remet en question n’en fait pas un être parfait ! En découvrant d’autres façons d’être parent, j’ai aussi souvent ressenti de la culpabilité, prenant plus fortement conscience que certains de mes comportements pouvaient être inadéquats pour mon enfant, et qu’il y avait d’autres manières de faire.
Face à l’importance du phénomène de « culpabilité ».associé à ces nouvelles façons d’envisager l’éducation, j’ai choisi.d’explorer un peu plus profondément ce sentiment dans ce contexte : à quoi il sert, ce qu’il entraîne, ce que l’on peut en faire, et ce qu’il cache aussi.
Qu’est-ce qui génère tant de culpabilité dans le fait d’entrevoir autrement l’éducation ?
La culpabilité est d’abord un processus naturel qui prouve une certaine évolution..Il est relié à l’empathie et à la capacité de se mettre à la place de l’autre. Nous culpabilisons en imaginant ce que notre enfant vit et ressent.dans les moments où nous n’avons pas pu être adéquats. Jusque-là tout va bien. Là où cela devient un problème, comme nous le verrons plus loin,.c’est lorsque la culpabilité bloque le fait de poursuivre son ouverture vers l’autre et vers de nouvelles façons d’être.
Nous culpabilisons aussi en fonction du degré et.de la qualité du jugement envers nous-même, et par rapport au fait de ne pas arriver à être conforme au modèle du « bon parent » que l’on souhaite atteindre.
La culpabilité, de façon générale, est souvent reliée à des représentations idéales et idéalisées, que l’on pense devoir atteindre. Ces représentations quant à la parentalité sont en lien avec nos croyances issues de notre environnement parental et familial, culturel et sociétal. On culpabilise de ne pas être le parent que l’on pense devoir être en fonction d’un modèle intériorisé, nous éloignant de la réalité et de nous-même. On oublie d’être soi au bénéfice de cette comparaison à un modèle. A cet égard la culpabilité ne nourrit pas un processus évolutif mais aggrave les blocages psychologiques.
« Avant j’avais des principes, maintenant j’ai des enfants… »
Ressentir de la culpabilité en comparant notre réalité humaine et quotidienne avec celle des livres où l’on découvre que l’on fait pas mal de choses à l’envers, de ce point de vue, il y a de quoi s’en vouloir ! Et avoir tout un tas de craintes, qui élèvent en nous le mythe du mauvais parent avec la peur de mal faire. Nous n’avons généralement pas attendu de lire des livres sur la parentalité positive pour culpabiliser. C’est un sentiment que chaque parent connait bien ! C’est tellement humain. Il est vrai aussi que les termes « bienveillant » et « positif ».sous entendraient qu’il y a des parents malveillants et mauvais. Aucun parent n’est malveillant au sens d’une intention volontaire et consciente de nuire ou faire du mal à son enfant. Chacun agit en fonction de ce qu’il pense être bon et juste pour éduquer son enfant, avec son vécu.
Devenir parent est forcément un bouleversement.existentiel, et une grande responsabilité.
Se questionner sur sa manière d’être parent ou éducateur, ça remue et secoue nos représentations et nos croyances sur l’éducation. Plus profondément, cela touche à la manière dont nous nous sommes construits. Ce que nous vivons et avons vécu de bon et moins bon en tant que fils et fille de nos propres parents, en tant que petits-enfants, et en tant qu’élève. Et aujourd’hui comme père, mère, et plus généralement en tant qu’homme et femme. D’où l’on vient, ce que l’on choisit aujourd’hui et où l’on va … Se questionner en tant que parent est un processus global en lien avec notre passé, le présent et notre futur, inévitable et souhaitable.
La principale raison qui selon moi élève tant le sentiment de culpabilité, comme une résistance nous empêchant d’accueillir plus simplement de nouvelles visions éducatives, vient surtout du fait que cela nous demande une « petite » révolution intérieure en tant qu’adulte.
Outre le fait de réaliser que nous ne sommes pas des parents parfaits (et tant mieux), l’effet de résistance peut être puissant, en ce que ces nouvelles façons de lire les émotions et les comportements de l’enfant nous amènent à ressentir les fois où nous avons-nous-même pu être malmenés par une éducation inadéquate voire violente. La résistance ne se situe donc pas tant face à ces nouveaux principes que vis-à-vis de ce qu’ils génèrent dans la prise de conscience de nos blessures d’enfants et la remise en question de nos propres parents, enseignants, éducateurs… C’est bien humain, il y a donc de quoi « résister » un peu…
Et dans ce processus : « Nous avons tendance à confondre culpabilité et responsabilité (…), or être responsable signifie s’interroger sur le sens de ses actes,.sans fuir leurs conséquences ni présumer que, par essence, nous agissons mal. La responsabilité, où consciemment j’assume ma part dans ce que je fais et ce qui m’arrive, et même le contraire de la culpabilité », nous dit la psychanalyste Virginie Megglé dans le bonheur d’être responsable.
Se sentir responsable donne de la force, culpabiliser nous fragilise.
Finalement, la vraie question, à mon sens n’est pas tant dans le fait de culpabiliser en découvrant d’autres modèles éducatifs, puisque c’est de ce point de vue, on l’a vu, bien humain. Mais plutôt en quoi ce type de culpabilité bloque le processus évolutif de la personne, en l’éloignant d’elle-même et de l’autre. En quoi ce sentiment est alors nuisible à la relation à soi, à son enfant et aux autres ?
LA CULPABILITÉ : CET ARBRE QUI CACHE LA FORET DE NOS ÉMOTIONS
Le sentiment de culpabilité, s’il persiste, devient systématique ou s’amplifie, peut avoir la fonction de bloquer l’émergence d’émotions plus douloureuses.
Il agit alors comme un mécanisme de défense.qui peut évoluer vers un système projectif et accusateur : de soi et/ou des autres, en l’occurrence, ici, envers les auteurs sur l’éducation bienveillante… Il est différent de dire et se dire : « je ressens de la culpabilité », que de penser « ces méthodes sont culpabilisantes ». Outre le fait que ce n’est pas dans leur intention, ni dans leurs outils pédagogiques, que ce soit avec les enfants ou les parents, les autres ne sont pas responsables de nos ressentis d’adultes..Ils peuvent en être le déclencheur mais non l’auteur. Lorsque l’on en vient à attribuer la responsabilité de notre ressenti aux auteurs de ces méthodes éducatives,.on entre.dans un mécanisme projectif, également défensif vis-à-vis d’émotions qui nous appartiennent et sont plus difficiles à conscientiser et.ressentir que la 1e couche de culpabilité.
Ce sentiment est donc à un certain niveau utile psychiquement car il nous protège de ressentis plus douloureux et plus inconscients. ensuite
Mais c’est aussi là qu’il atteint sa limite, lorsqu’il nous empêche de nous ouvrir davantage, de devenir plus conscient de nous-même et d’intégrer de nouvelles pensées et idées extérieures.
Il y a souvent d’autres émotions cachées derrière. Le sentiment de culpabilité,.c’est l’arbre qui cache la forêt. Rester coincé dans un système projectif et accusateur.est une première couche.qu’il est intéressant de creuser en entrant un peu plus en soi même. Pour ne pas se fermer et.continuer le chemin que nous avons choisi d’entamer en nous intéressant à d’autres façons d’être et de faire avec nos enfants.
Les émotions cachées derrière.le.sentiment de culpabilité peuvent être : la peur de ne pas être à la hauteur, d’être un mauvais parent, peur de son ombre, de sa propre violence, de la souffrance liée à son histoire, sentiment d’impuissance, tristesse vis-à-vis de nous-même,.dépression,.désespoir, colère et remise en question de l’éducation reçue par nos parents et blessures de l’enfance…
Alors, que faire en présence de notre culpabilité et de nos émotions ensuite
Il est vrai que les ouvrages sur la parentalité positive s’intéressent finalement assez peu aux parents et à la relation que l’adulte entretien avec lui-même dans cette dimension de la parentalité. On nous dit ce que l’on doit faire.pour être un bon parent pour nos enfants, mais plus rarement comment être un bon parent pour soi-même, prérequis pourtant indispensable pour pouvoir être dans la bienveillance avec autrui. Le paradoxe va même jusqu’à me faire dire que nous maintenons souvent à l’intérieur.de nous un système plutôt malveillant, violent et très punitif envers nous-même, à l’encontre des principes que l’on tente de déployer à l’extérieur auprès de nos enfants : à coup de jugement,.critiques, accusation,.chantage (si dans cette situation je ne suis pas parvenue à être douce et calme avec.mon enfant je suis vraiment une mauvaise mère, je suis méchante, nulle…) ensuite
La culpabilité bien qu’elle ait son utilité comme on l’a vu,.n’est ni une bonne conseillère à long terme ni une preuve d’amour et.de bienveillance envers soi. Or, nous ne pouvons être réellement bienveillant avec nos enfants sans l’être suffisamment avec nous-même. Dans ce processus, nous pouvons choisir de nous aimer.et de prendre soin de nous même lorsque nous culpabilisons et nous nous jugeons sévèrement d’être de mauvais parents… Au lieu de rester coincer dans ce sentiment 1e de culpabilité, nous voyons alors émerger d’autres parties de nous qui se sentent fragiles et vulnérables, impuissantes : celles qui ont peur et celles qui ont été blessées dans le passé, celles qui nous jugent si durement, celles qui nous figent et nous terrorisent parfois. ensuite
Mais alors que faire,.concrètement, me direz-vous… ? ensuite
Comment pourrions-nous prendre soin de notre culpabilité.et de ce.qu’elle provoque chez nous, autrement dit, l’empathie commençant toujours par soi-même, comment pourrions-nous être bienveillant.avec la partie de nous.qui s’en veut et aller voir un peu plus loin ? ensuite
La prochaine fois que vous ressentirez de la culpabilité en entendant parler d’éducation bienveillante, en lisant sur le sujet, ou en tentant de la mettre en œuvre : je vous invite à prendre quelques minutes pour vous assoir dans un endroit calme, si possible, ou en restant là où vous êtes, et écoutez ce qui se passe en vous.lorsque vous culpabilisez : comment est-ce dans votre corps ? Laissez venir les sensations, les pensées, les images et peut-être les souvenirs qui sont présents. Voyez s’il est possible pour vous de sentir et d’accéder à la 1e couche d’émotions qui se cachent sous celle de la culpabilité. Peut-être vous sentirez vous triste, vulnérable, impuissant, en colère, démuni, seul… Vous serez alors bien plus proche de vous-même que.lorsque la culpabilité fondait une armure qui empêchait cette authenticité, et le contact avec ce qui se passe en vous dans la situation. ensuite
Voyez ensuite s’il est possible pour vous.d’accueillir tel quel ce qui se passe, ce que vous ressentez, sans jugement ni commentaires, et de vous accorder une présence maximale dans cette état, et dans ce niveau de sensibilité. Prenez le temps de sentir votre respiration,.suivez quelques instants le va et vient de votre souffle. Prenez vous dans vos bras avec amour et tendresse, dans l’état que vous traversez,.comme vous le feriez avec un enfant en détresse. ensuite
Quand la culpabilité est trop forte, voyez s’il est possible de vous offrir un moment de retour sur soi en douceur et avec empathie.
On entre là dans un processus plus responsabilisant que culpabilisant, qui apporte du mouvement, de l’ouverture. La responsabilité nous permet d’évoluer, la culpabilité persistante provoque repli, blocage et stagnation.
Et alors, que se passe-t-il en vous lorsque vous vous sentez exister, tel que vous êtes aujourd’hui, en relâchant la volonté de vous améliorer,.et de tendre vers l’image du parent parfait ?.Que se passe-t-il lorsque.vous vous dites que vous faites du mieux que vous le pouvez aujourd’hui ? ensuite
Dans l’intention que la culpabilité.ne soit plus un frein à l’ouverture de la conscience qui nous permet d’évoluer, accueillons-la pour ce qu’elle est. Lutter contre ou vouloir s’en débarrasser ne ferait que la renforcer. Prendre le temps d’écouter ce qu’elle a à nous dire et ce qu’elle dit de.nous permet d’accéder à d’autres parties de soi. En restant ouvert et présent à soi, on cultive la possibilité de nourrir une relation bienveillante à son enfant et aux autres, qui ne sera certes pas parfaite mais riche de possibilités et de découvertes ! ensuite
Le monde et nos enfants n’ont pas besoin d’adultes.« parfaits » qui appliqueraient comme des robots.des principes éducatifs, aussi bienveillants soient-il. ensuite
Nous avons besoin d’adultes.responsables et suffisamment conscients. Conscients d’eux même, de leurs besoins,.de leur histoire, de leurs blessures, et capables d’un retour sur eux-mêmes,.d’une présence suffisamment aimante envers eux.lorsque la relation à l’enfant les active et les bouscule. Pour ensuite être dans une relation authentique et empathique avec l’enfant. Commençons par être un bon parent pour nous même.en nous accompagnant et en nous offrant douceur.et bienveillance lorsque l’on se confronte à nos difficultés et à tout ce que cache notre culpabilité. Car chez les humains, pour grandir à tout âge, il n’y a jamais.« trop » d’amour, de bienveillance et d’empathie.
Et pour finir sur une note joyeuse et positive, sachez que de toutes façons : ensuite
PLUS JE ME PLANTE,.PLUS JE POUSSE !
Céline Eliot, pour l’association OZE
Psychothérapeute et coach
Créatrice et animatrice du collectif EDUCATION EN CONSCIENCE à Marseille
www.facebook.com/psychotherapie.celine.eliot
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