Votre ado a du mal à choisir sa voie, il ne sait pas ce qu’il veut faire plus tard ou bien a du mal à aller vers les autres ? Trois spécialistes vous donnent leurs conseils. Ainsi, vous pourrez aider votre adolescent à bien se sentir dans sa vie.
- Nathalie de Boisgrollier, [1], coach en parentalité et fondatrice d’une association d’éducation bienveillante
- Isabelle Servant, [2], ex-enseignante, coach et formatrice en Orientation Positive©
- Michel Fize, [3], sociologue, retraité du CNRS et coach parental.
A se sentir bien dans ses études
Selon Nathalie de Boisgrollier :
Il convient d’élever votre adolescent dans le futur dans lequel il va vivre. Même si cela paraît angoissant, le monde du travail va profondément changer dans les années à venir et de nouveaux métiers vont apparaître. Donc une course aux grandes écoles n’est pas forcément nécessaire. Elle vous suggère plutôt de trouver une école adaptée au potentiel de votre ado et à son rythme, et dans laquelle il se sente bien.
Pour Isabelle Servant :
Si votre ado a des difficultés scolaires, il peut être intéressant de trouver comment l’aider dans une ou deux matière(s) qui lui posent un problème. Pas forcément via un cours privé payant mais en prenant le temps de voir avec lui/elle comment il/elle s’y prend pour apprendre et le ramener à l’essentiel. Chaque jeune a la capacité à comprendre avec du temps et la bonne méthodologie. Quitte à revenir en arrière pour reprendre quelques bases.
Michel Fize :
Il pense qu’il faut changer votre regard sur l’école qui est un lieu important mais cela ne doit pas tourner à l’obsession. L’important est de se désintoxiquer de la performance scolaire, on ne meurt pas d’un échec. Il est vrai que la réussite scolaire conditionne la réussite tout court, notamment la réussite sociale. L’important est de faire comprendre à votre ado qu’il travaille pour lui (et pas pour vous). Ne pas être sur son dos en permanence pour savoir s’il a fait ses devoirs mais plutôt conclure avec lui un contrat de confiance. L’idéal est qu’il se mette aux devoirs en rentrant des cours et seulement ensuite devant les écrans.
A trouver une perspective professionnelle
Comme l’explique Nathalie de Boisgrollier, aujourd’hui les grandes entreprises commencent à recruter selon un coefficient émotionnel des profils ayant des compétences naturelles de coopération ou de gestion du conflit. Si votre adolescent a déjà fait du scoutisme, ce sera un atout sur son CV. En effet, il aura appris des valeurs et la vie de groupe. Les entreprises regardent aussi les activités associatives ou bénévoles. Le bénévolat peut lui permettre d’acquérir une première expérience avec des valeurs de solidarité. Vous pouvez parler à votre ado du service civique. Il aura la possibilité de faire une mission à l’étranger. Celle-ci pourra lui apporter connaissance de lui, confiance en lui et un nouveau regard sur le monde.
Si votre ado a une envie ou un rêve professionnel, pour Isabelle Servant, « il semble important de le soutenir mais également de l’amener à passer du rêve à la réalité pour vérifier si cela lui correspond en vrai avant d’entamer plusieurs années d’études ». Rencontrer des professionnels, faire un stage, ou a minima une demi-journée d’observation. S’il ne sait pas, commencez par observer ensemble ses forces, talents, prédispositions, ce qu’il fait bien -voire mieux que les autres- et ce qu’il aime. Explorez ensemble les possibilités professionnelles associées.
Pour Michel Fize, si votre ado n’a aucun passion, aucune envie, il faut l’aider à créer une motivation. Pour cela, vous pouvez l’aider à trouver ce qui le passionne (sport, ciné, musique). Et à s’informer mais sans faire à sa place pour le rendre autonome.
A se faire de nouveaux amis
Pour Nathalie de Boisgrollier, il n’y a aucune obligation à se faire de nouveaux amis. Mieux vaut qu’il ait deux ou trois vrais amis. Ce qui est plus inquiétant c’est si votre ado passe tout son temps isolé derrière un écran. En revanche, votre adolescent a un réel besoin d’activités extra scolaires.
Au-delà d’entamer une nouvelle activité qui lui plaît (sportive, culturelle, artistique, manuelle,…), Isabelle Servant vous suggère de lui proposer de faire un atelier ou un stage sur une journée ou quelques jours (découverte d’un sport, d’une activité). Vous pouvez aussi lui proposer d’organiser une soirée jeux (ou autre) chez vous un week-end ou un soir en osant inviter quelques amis potentiels (de sa classe par exemple). Ou encore de commencer à faire du bénévolat pour une association qui lui plaît et soutenir une cause.
Michel Fize souligne que c’est la question du bien-être qui est importante. Si votre ado est un solitaire qui est bien avec un livre, aucun problème. C’est l’enfermement sur soi qui traduit une difficulté. Le sociologue évoque un droit à la paresse et à ne rien faire. Pour se faire des amis, vous pouvez expliquer à votre ado qu’il faut se montrer sympathique aux autres, accueillant en rendant service. Mais aussi être plein d’humour, souriant et ne pas se mêler des querelles des autres.
A se sentir mieux dans sa peau d’ado
Nathalie de Boisgrollier vous suggère :
De parler de votre propre histoire, de faire un tour de table où chacun raconte son adolescence. Par exemple : « moi, j’avais plein de boutons » ou « j’aurai rêvé de faire 1,75m car toutes mes copines étaient grandes ». Ou encore : « si tu avais une baguette magique, qu’est-ce que tu changerais chez toi ? ». Saisissez une émission télé ou une actualité pour parler du sujet.
Isabelle Servant explique :
Qu’idéalement, faire du sport adapté à ses goûts va créer une chimie interne extrêmement positive et intéressante pour votre ado. Et également le libérer du stress potentiel. Il est également important pour vous de porter votre attention sur ce qu’il/elle fait bien et le lui dire.Tant de jeunes ne peuvent citer plus de deux qualités qu’ils se donnent ! Vous devez aussi lui accorder du temps d’écoute (en faisant une activité à deux régulièrement). Et enfin lui faire confiance tout l’aidant à prendre sa vie en main.
Pour le sociologue Michel Fize :
La majorité des adolescents se porte bien. « Ils sont heureux d’être des adolescents, de grandir et cela ne va pas toujours assez vite à leurs yeux ». Quand vous voyez qu’il ne va pas bien, ce n’est pas une tare liée à son âge mais plutôt un trait humain. Vous pouvez lui dire qu’il a le droit ne pas aller bien, que cela nous arrive tous. L’adolescent est une personne à notre image, pas totalement autonome qui peut éprouver certaines difficultés à éprouver les contraintes familiales.
A se sentir mieux dans sa tête d’ado
Nathalie de Boisgrollier vous invite à faire des choses avec votre adolescent, à partager des bons moments en famille. Vous pouvez aussi l’aider à organiser des projets solidaires pour répondre à sa question « qui je suis-je ? » et répondre à ses besoins de quelle va être sa contribution au monde.
Isabelle Servant explique que les jeunes ont besoin d’être rassurés sur leur potentiel et d’une reconnaissance sur l’être magnifique et unique qu’ils sont à l’intérieur. Qui peut dire qu’il n’a pas de talents ? Celui qui n’a pas découvert les siens ! Ils ont aussi besoin d’être écoutés, qu’on les aide et qu’on les guide pour créer une vie qui leur ressemble vraiment, dans le passage à l’action (et comprendre que changer d’avis et faire des erreurs, apprendre, fait partie du chemin !). Vous devez donc être bienveillant mais responsabilisant !
Pour Michel Fize, un adolescent est entouré de contraintes, en particulier celle de vivre avec ses parents et d’aller à l’école. Il n’a pas le choix et ce n’est pas drôle. Il n’est pas nécessaire de connaître une crise, l’adolescent qui va bien est celui qui ne fait pas de crise.
Dans sa vie sentimentale d’ado
Pour Nathalie de Boisgrollier :
Si votre ado est bien dans sa tête ou dans ses études… sa vie sentimentale n’en sera que plus facile. Elle constate cependant que cette nouvelle génération qui s’initie à la sexualité très tôt, qui en sait plus et en fait plus que ses parents, rêve également d’une relation de couple mais a du mal avec les compromis, à faire face aux difficultés et à construire une relation. Pour l’aider, vous devez développer son goût de l’effort : s’il n’a pas envie d’aller au musée, forcez-le ; s’il veut arrêter son activité sportive, imposez-lui de terminer l’année ; il doit manger ce qu’il y a à table… oser dire non pour dire un vrai oui.
Peu importe l’âge, Isabelle Servant rappelle que :
Les relations humaines et l’amour sont au centre de nos vies. Il est important de l’amener à comprendre qu’il/elle a le choix, c’est sa vie. A lui/elle d’y faire entrer quelqu’un qui partage ce qui est important pour lui/elle et qui va le/la valoriser, le/la tirer vers le haut, le/la soutenir. A lui/elle de ne pas subir sa vie amoureuse mais de choisir qui va partager ces moments privilégiés.
Vous pouvez aussi découvrir avec lui/elle le livre « Les 5 langages de l’amour » de Gary Chapman et en discuter car nous ne parlons pas tous la même langue ! Il y a ceux qui préfèrent donner ou recevoir des paroles valorisantes, il y a les adeptes du contact physique et du toucher, ceux qui privilégient le temps passé ensemble, pour d’autres ce seront les cadeaux reçus/donnés, et enfin, il y a ceux qui rendent de petits services. A chacun sa langue et cela peut causer quelques malentendus. Quelle est votre langue ? Celle de vos parents ? de votre amoureux(se) ?
Selon Michel Fize :
Votre ado passe par les mêmes hésitations, les mêmes inquiétudes que vous au même âge, même s’il se montre un peu plus audacieux et commence tout un peu plus tôt. Il faut parler de vous, par exemple, « moi non plus à ton âge je n’avais pas de copain, j’en souffrais un peu mais cela m’a permis de faire autre chose et de ne pas en faire une obsession » quitte à inventer, afin d’entamer le dialogue.
L’histoire de leur livre de l’idée à la parution…
Nathalie de Boisgrollier :
Fondatrice d’une association de parentalité positive, après son livre « Elever ses enfants sans élever la voix », Nathalie de Boisgrollier a constaté que son public avait grandi et avait besoin de savoir comment faire avec un adolescent à l’âge où la menace, l’autoritarisme ou le chantage ne marchent plus. « Nous avons une fausse image de l’adolescent : dès qu’il ne fait pas ce que l’on veut, nous avons l’impression d’une perte de contrôle. Or votre adolescent se construit ; c’est une étape normale de sa construction. Des parents viennent me voir en atelier, me posent des questions. Parmi les lecteurs, il y a ceux qui découvrent l’éducation positive, d’autres déjà adeptes et qui sont rassurés avec l’impression d’être sur la bonne voie. »
Isabelle Servant :
Nous sommes tous uniques, différents et complémentaires raconte Isabelle Servant ! L’envie à travers ce livre est d’aider chacun à se construire une vie sur mesure, une vie qui lui ressemble vraiment, professionnelle notamment. Cela commence par se découvrir à travers 20 questions et explorer ce que l’on est à l’intérieur : points forts, atouts, rêves et envies, formes d’intelligences, ce que l’on aime ou ce qui nous attire, contribution au monde, etc. Puis après s’être reconnecté à ce potentiel unique, cette singularité qui fait la richesse de chacun, il faut passer à l’action ! Via 20 clés, le livre amène le lecteur à aller sur le terrain que ce soit pour vérifier si ses envies professionnelles se confirment « en vrai » ou pour explorer certaines pistes qui se profilent (travailler avec des enfants, dans les jeux vidéos, dans la biologie ou l’architecture…). Autant vérifier sur le terrain avant de s’engager sur plusieurs années d’études !
Michel Fize :
Comme l’explique Michel Fize, ce livre, c’est le prolongement de Mon ado en 100 questions paru chez Eyrolles en 2013. « L’adolescence est un sujet qui me passionne et que j’étudie depuis 25 ans, notamment la relation ado-parents. Je souhaitais au travers de mon travail scientifique au CNRS produire une autre image de l’adolescence dédramatisée à partir d’enquêtes de terrain, d’investigations minutieuses et de milliers d’adolescents rencontrés. J’ai des retours positifs avec des parents qui me contactent pour avoir des conseils et que le livre a éclairé. »
Aurore de Lagane, pour l’Association Oze.
[1] Autrice de Elever son ado sans baisser les bras, Ed. Albin Michel, 256p., 16,90€. Association OZE, site internet : educationpositive-oze.fr
[2] Autrice de Et si je trouvais enfin ce que je veux faire de ma vie, Ed. Eyrolles, 128p., 16,90€.
[3] Auteur de J’aide mon adolescent à grandir, Ed. Eyrolles, 192p., 12€.
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