Le harcèlement scolaire ou l’histoire du mille-pattes et de l’escargot

C’est l’histoire d’un mille-pattes qui rencontre un escargot.
L’escargot lui demande : 
– «  dis-donc, comment fais-tu pour marcher avec toutes ces pattes ? Lesquelles mets-tu en premier ? »
Le mille-pattes lui répond :- « bah, je sais pas, j’y pense pas, j’avance mes pattes, c’est tout. »
L’escargot passe alors son chemin. Mais le mille-pattes, avant de reprendre sa route, réfléchit à la question de l’escargot. Et à force, il finit par s’emmêler les pattes entre elles et se retrouve sur le dos, incapable de se retourner.

C’est alors qu’un faucon apparaît dans le ciel et repère immédiatement cette proie facile. Il fonce sur lui et le gobe.

harcèlement

Si vous ne voyez pas le rapport entre cette petite histoire et les situations de harcèlement, suivez-moi…

 

Définition du harcèlement

Avant tout, rappelons qu’une situation de harcèlement se définit par la combinaison de 3 facteurs :

  • une intention volontaire de nuire à autrui,
  • une répétitivité et une récurrence d’actions réalisées à l’encontre d’une personne,
  • un vécu négatif et douloureux de la part de l’enfant harcelé.

 

Il existe différents types de harcèlement à l’école : moral, physique, sexuel, et plus récemment numérique. Le « cyber harcèlement » est particulièrement nocif car il trouve d’une part de multiples canaux d’expressions (SMS ou e-mail, diffusion d’images personnelles, propagation de films ou de photos, création d’un site web…). Il est d’autre part intemporel : il se poursuit après l’école, en laissant une trace sur internet.

De plus, le dénigrement d’une personne est souvent extrêmement rapide. Il se répand auprès d’un grand nombre d’individus (communication de masse), avec un effet « boule de neige » difficilement contrôlable.

Enfin, il est parfois encore plus violent que les autres formes de harcèlement du fait que le harceleur ne voit pas les réactions de souffrance psychologique de sa cible.

Ainsi, le harcèlement scolaire ne sévit pas uniquement à l’école mais aussi sur le trajet école/domicile, au centre aéré, pendant les sorties scolaires, voire à la maison.

 

Où trouve-t-il son origine ?

Il est tout d’abord important de noter que le harcèlement scolaire se retrouve dans tous les milieux sociaux.

Son origine n’est à ce jour pas clairement définie mais elle est bien souvent multiple.

Il peut être généré par exemple par un environnement scolaire malsain, bruyant, avec des locaux mal conçus. Ce type d’environnement met les élèves sous stress.

L’ambiance qui règne au sein de l’école entre les enseignants et les élèves peut également être un facteur déclencheur.

On peut observer ce phénomène dès la maternelle. Même si on constate davantage de situations de harcèlement en primaire.

Enfin, les harceleurs sont souvent des enfants qui n’ont pas été assez sécurisés au niveau affectif. Ils vont donc plus spontanément se mettre dans un rapport de force avec autrui.

Ainsi, le harceleur ne « choisit » pas sa victime au hasard. Il jette souvent son dévolu sur les enfants ayant des différences physiques même minimes (port de lunettes), les bons élèves ou ceux qui ont une faible confiance en eux.

 

Quelles en sont les conséquences ?

Le harcèlement peut avoir des suites à long terme et des conséquences multiples plus ou moins immédiates :

  • Physiologique : la sécrétion de l’hormone du stress de manière récurrente peut faire émaner des maladies psychosomatiques si la situation perdure,
  • psychologique : développement d’une anxiété de fond, syndrome de dépression,
  • familial : dégradation des relations avec la fratrie (l’enfant devient harceleur en retour) et avec les parents (agressivité, repli),
  • social : repli sur soi, exclusion de son cercle d’amis,
  • scolaire : phobie scolaire, plus envie d’aller à l’école.

 

Devant l’ampleur des dégâts générés, il est important d’être attentif aux signaux d’alerte

D’autant plus que les enfants ne mettent pas toujours en mots la douleur qu’ils ressentent. Ils s’expriment davantage par leur comportement, notamment dans le cas de harcèlement où la loi du silence prévaut, de peur des représailles, de ne pas être crus, d’une difficulté à devoir se remémorer ces moments, d’un sentiment de honte et de culpabilité.

Aussi, un changement soudain de comportement sur un mode agressif doit alerter. Des dégradations fréquentes du matériel scolaire, un refus de se rendre à l’école ou de participer aux activités périscolaires habituelles, ou encore une chute brusque des résultats scolaires sont autant de signaux auxquels il faut être attentif.

 

Que faire face à une situation de harcèlement ?

Tout d’abord, il est important de ne pas interpréter la situation. La prise de recul dont sont capables les adultes nous permettent de relativiser. Aussi, le vocabulaire employé peut renforcer le sentiment de culpabilité de l’enfant, banaliser ou renier l’événement, comme par exemple : « tu dois vraiment ne pas être sympa pour…, », « à mon avis, tu n’y mets pas du tien… », « tu exagères, tu n’en fais pas un peu trop là ? ».

Ensuite, il faut donner les moyens à l’enfant de se défendre par lui-même, ne pas intervenir uniquement entre adultes, ce qui dévalorise l’enfant encore plus, lui donnant l’impression de ne pas être capable d’actions. Il n’est pas question de lui dire « tu dois pouvoir te défendre tout seul », ou «  à ton âge, tu n’es plus un bébé ». Il est nécessaire de l’accompagner et de l’aider dans l’élaboration de solutions.

 

Au sein des établissements, il existe différents acteurs à qui s’adresser : CPE, chef d’établissement, délégués de classe, parents d’élèves, académie etc. Il est important dans ce cas de faire preuve d’objectivité, en rapportant des faits, sans accusation de l’institution ou des encadrants, sous risque de bloquer la discussion.

Il existe également un dispositif de « médiation entre pairs » permettant de minimiser l’intervention de l’adulte, jugé parfois incapable de comprendre ce qui se joue entre « enfants ». Cela permet de responsabiliser les élèves face à ces enjeux. Il est nécessaire d’être formé à ces techniques bien particulières, qui restent encadrées par des membres de l’équipe enseignante.

 

Et si cela ne suffit pas ?

Certaines actions plus radicales doivent être mûrement réfléchies avant d’être entreprises. En particulier quand il s’agit de porter plainte auprès de la justice. Cette démarche n’est pas forcément bien vécue par l’enfant qui doit revivre des situations douloureuses au travers de ses dépositions. De plus, le constat de harcèlement scolaire étant difficile à établir, la plupart des plaintes sont classées sans suite et renforce le sentiment d’injustice de l’enfant.

Certains parents envisagent de retirer l’enfant de la classe ou de l’école. Cela peut régler la situation à court terme mais induit souvent un constat d’échec pour l’enfant. D’autant plus qu’il peut recroiser ses harceleurs dans un autre contexte.

 

L’idéal est bien sur de pouvoir se prémunir de ce fléau et de ne pas faire de nos enfants de futures potentielles victimes en puissance. Suivons-donc l’enseignement de l’escargot et du mille-pattes : donnons confiance en eux à nos enfants dès le plus jeune âge et faisons de leurs différences des forces.

 

Des lectures, des rencontres… qui ont guidées mon propos :

  • Rouge, de Jan De Kinder, chez Didier Jeunesse,
  • Harcèlement en milieu scolaire, Victimes, auteurs : que faire ?, Hélène Romano, aux éditions Dunod.
  • APESE: Association Pour un Environnement Serein à l’Ecole
  • Chagrin Scolaire, A 180°

Alexandra Michalon pour l’association Oze

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