Pour une meilleure expression écrite ou orale de votre enfant

Mon enfant a des problèmes d’expression. Il est en difficulté pour construire ses phrases (2 à 7 ans). Je vous propose des pistes, aussi adaptées aux grands enfants ou préadolescents, pour progresser dans l’expression orale et écrite.

Il serait intéressant dans un premier temps, d’éliminer les jeux ayant un lien trop visible avec l’enseignement du français. Je pense notamment aux petits jeux sur les ordinateurs ou tablettes pour enfants. Pour les plus grands, on s’abstiendra de proposer des jeux tels que : Trivial Poursuit junior, scrabble junior, des chiffres et des lettres, le baccalauréat, etc.

De la maternelle au collège, l’expression à travers des activités du quotidien

Il est important de décrire à votre enfant ce que vous faites, quand vous préparez avec lui le repas, mettez la table, rangez la chambre, faites une sortie en vélo, etc. Le risque zéro n’existe pas, alors adaptez les petites responsabilités que vous donnerez à votre enfant à ses capacités. Vous serez sûrement surpris.

Tout est prétexte pour apprendre le vocabulaire et se familiariser avec la notion de terme générique. Par exemple : dans le sous ensemble des couverts, il y a la famille des couteaux, des cuillères et des fourchettes. Il existe aussi différents types de couteaux : à pain, à beurre, à poisson, etc.

L’enfant apprend en imitant l’adulte à qui il aimerait ressembler. Donnez-lui l’opportunité de partager vos passions. Cela donne du sens et encourage l’enfant à s’exprimer. Chaque mot nouveau mériterait de lui être expliqué.

Vers 3 ans, on utilisera des phrases simples, sujet-verbe-compléments (ex : Je mets le gâteau dans le four). Vers 4-5 ans, on peut passer aux phrases plus complexes (ex : Tu mets ton manteau pour sortir parce qu’il fait très froid, ce matin.)

L’enfant n’invente pas le vocabulaire de la langue française. Personne ne le peut d’ailleurs. Tout individu l’acquiert par transmission. Pour progresser et s’enrichir, l’interaction est indispensable. La facilité d’expression est à ce prix.

Pour les plus grands enfants, ce peut-être de faire du bricolage pour la maison avec un des parents, décider de refaire la décoration d’une chambre, etc.

Jouer tout seul dans sa chambre ou être assis devant les écrans (télévision, tablette…) limite les acquisitions de vocabulaire et de syntaxe. Par ailleurs, l’enfant est un être en construction ; quoi de plus mauvais pour sa santé que de mettre des Smartphones dans les mains d’un bébé. Quelles répercussions sur son cerveau ? et en particulier sur ses capacités d’expression ?

Pourquoi jouer avec votre enfant est si important ?

Parce que vous vous autorisez à changer les rapports parents-enfants dans un cadre bien précis. En lui consacrant même 10 minutes, vous êtes dans l’instant présent, concentré sur votre enfant. Quel bonheur ! Vous êtes d’égal à égal, pas de notes, pas de compétition. La règle étant de passer du bon temps et de fabriquer un trésor de souvenirs de joie et de complicité.

De manière inconsciente, les jeux et les chansons lui apprennent la syntaxe (l’ordre des mots dans la phrase, « Loup, y es-tu ?), le vocabulaire et la conjugaison (« Il nous mangerait »). Il y découvre les différentes formes de phrases : affirmative, négative, exclamative, interrogative.

Les jeux symboliques : quand l’enfant imite l’adulte, il exprime ses émotions (jouer au bébé, à la marchande, au pompier, etc.).

Les devinettes : Pour les tout-petits (2 ans), on choisira un animal de la ferme. On lui donnera des indices : C’est un animal. Il est rose. Il a la queue en tire-bouchon. Dans beaucoup d’histoires, il a peur du loup. A l’enfant de trouver « le cochon ».

Vers 4-6 ans, on lui demandera de poser 2 questions avant de donner sa réponse : Combien de pattes a cet animal ? A-t-il des plumes, des poils, des écailles ? On lui apprendra alors la structure et le ton de la phrase interrogative.

Et quand votre enfant grandit ?

Plus l’enfant grandira, plus le nombre de questions augmentera. Plus on l’invitera à chercher des indices pour lui apprendre à déduire. On l’amènera à poser des questions de plus en plus précises sur le lieu de vie (continent, pays, climat, type de végétation).

A partir de 8-9 ans, on augmentera le nombre de questions minimal avant de prononcer le nom d’un animal. Cela permet de raisonner et aussi d’attendre, dans une société où tout est dans l’instant.

On peut l’interroger ainsi : « A quelle espèce appartient cet animal ? »

  • Un mammifère, un reptile, un insecte, etc.
  • « Est-ce un animal ovipare ou vivipare ? »

A partir de 9-10 ans :

  • On s’amusera à choisir des animaux en quelque sorte « pièges » :
  • Un homme ou une femme (l’être humain est un animal)
  • Une araignée (elle a 8 pattes, ce n’est donc pas un insecte)

A cet âge, l’enfant a suffisamment de connaissances ; il est possible d’intervertir des rôles, à chaque partie. D’abord, l’enfant cherchera le nom de l’animal, puis ce sera à lui d’en choisir un et de répondre juste à chaque question. En cas de mauvaises informations données par l’enfant, on recommencera la partie, sauf si le jeune le fait exprès.

Avec l’enfant, l’adulte essaiera éventuellement de changer de thème comme : les métiers, certains types d’objets, etc.

Le jeu « Qui est-ce ? » est aussi une excellente occasion de construire des phrases justes avec un aspect ludique, tout en s’entraînant à comparer, mémoriser, réfléchir, trouver des stratégies plus efficaces. Pour les enfants du primaire, ils utiliseront le vocabulaire des teintes de cheveux : blonds, roux, châtains, bruns, gris ou poivre et sel… Les textures : raides, frisés, bouclés… Les longueurs : courts, jusqu’aux épaules, chauve… Ce vocabulaire étant bien acquis en français, pourquoi ne pas l’apprendre en anglais ou en allemand, de façon ludique.

Du nourrisson au collégien : la lecture

expressionLire permet de corriger les erreurs de syntaxe et d’enrichir son vocabulaire. Malheureusement, certains enfants n’ont pas le goût de la lecture. Mais cela aussi s’apprend. L’idéal, serait de commencer avec le nourrisson, vers ses 3 mois. Non, non, ce n’est pas trop jeune ! C’est beaucoup plus simple pour un bébé de comprendre ce que vous allez faire, en lui montrant sur un livre : un biberon, un doudou, un lit, lorsqu’il le voit dessiné, que lorsqu’il est dans vos bras, et que vous le préparez en lui disant : « Oui, oui, j’arrive, je te donne ton biberon ».

La lecture comme tout ce qu’on apprend devrait rimer avec plaisir, liberté et respect.

C’est aussi une question de cohérence. Comment aimer lire, quand l’enfant ne voit jamais aucun de ses parents lire un journal, une revue, etc. ? C’est pour le tout-petit pourtant une activité magique. Il est assis, ses yeux bougent et c’est tout.

Lire pour tous les âges

Avec le tout-petit, je lui propose un câlin livre. L’adulte prend l’enfant sur ses genoux jusqu’à 5 mois. Après, c’est l’enfant qui devient demandeur. Vous vous assoirez par terre, avec un livre entre les mains et vous lirez à voix haute. Vous laissez l’enfant libre de venir vers vous ou pas. Comme vous ne l’avez pas dans les bras, il est libre d’écouter le temps qu’il veut. De partir, de revenir.

Lorsque vers 6-8 mois l’enfant rampe par terre et fait des tourner-bouler, ils prennent un grand plaisir d’aller voir la lectrice, quand elle est comme eux allongée sur le sol ou le tapis. Un peu plus grand, l’enfant choisira de s’asseoir sur vos genoux ou se caler contre votre épaule.

Vers 2 ans et demi à 7 ans, c’est souvent l’enfant qui est demandeur. On lui lira une première fois le livre, puis à sa demande, une seconde fois. Vous vous amuserez ensuite à raconter l’histoire, c’est-à-dire à reformuler avec vos propres mots. Donnez du sens et de la vie à l’histoire, en l’accompagnant de bruitages et de gestes. L’enfant peut alors s’autoriser à lire (à vous imiter raconter), alors qu’il ne le sait pas. Il en ressent de la fierté, prend confiance en lui et prend du plaisir à jouer à lire.

Améliorer la syntaxe ou le vocabulaire

Lorsque la syntaxe ou le vocabulaire ne sont pas adéquats, l’adulte reprend la phrase avec tact. « Tu voulais dire : il faut que le bébé sorte de son bain et il a très envie d’y rester ». Surtout, on n’oblige pas l’enfant à répéter, au risque de le bloquer voire de le décourager à s’exprimer. Son cerveau a entendu la tournure de phrase appropriée et l’enregistre. Il l’intégrera, naturellement. Bien évidemment, lorsque l’enfant est à l’école primaire, et qu’il a besoin d’apprendre un peu plus vite, avec son accord et sa bonne volonté, il serait plus judicieux de l’inciter à reformuler correctement les phrases.

Remarque : Même si c’est un peu dur et frustrant pour l’enfant, à partir de trois ans, on fera celui ou celle qui ne comprend pas ce que l’enfant demande, s’il ne fait que des gestes. Il faut lui apprendre que la parole est magique. Elle permet de se faire comprendre et d’obtenir ce que l’on souhaite. Valoriser son expression de cette façon est redoutablement efficace.

On attendra que l’enfant fasse l’effort de dire deux mots. S’il pleure pour obtenir ce qu’il convoite, on lui répondra : « J’aimerais bien te donner ce que tu veux mais je ne comprends pas, parle-moi ». Quand il a accepté de dire au moins deux mots, on lui reformulera la phrase simple : sujet-verbe-complément.

Peu à peu, on deviendra plus exigeant en termes de nombre de mots, et très vite, il fera des phrases comme tous les autres enfants. Bien sûr, cette technique ne s’adresse qu’à des enfants ordinaires.

Encore quelques stratégies pour enrichir les capacités d’expression de votre enfant !

Pour les grands enfants ou les préadolescents qui n’aiment pas lire ou préfèrent jouer, pas de forcing.

Mine de rien, vous qui connaissez votre enfant comme personne d’autre, vous allez chercher dans la bibliothèque de quartier, non pas des livres mais des revues, des flyers d’activités, sur les sujets qui le passionnent. Attention, votre enfant n’est pas un fan des livres, prenez des documents qui sont assez avares en pages.

Ensuite, il faut être stratégique : mettez un ou deux documents dans les WC ; il y a de fortes chances pour que toute la famille les lise. Pourquoi ? C’est tout simple. Quand vous êtes aux toilettes, vous êtes assis ou debout et vous ne pouvez pas bouger en quelque sorte. Alors, en attendant, lire une demi-page peut être un bon moyen de passer le temps. C’est la technique de l’homéopathie (un article d’une vingtaine de lignes bien intéressant, on finit par y prendre goût).  Un peu d’humour : seul problème de ma technique, il faudra éventuellement limiter le temps dans les toilettes, afin d’éviter la queue dans le couloir.

Toute mise en mot est expression de soi. Alors n’hésitez pas à le faire parler sur le sujet qu’il connait le mieux : lui-même.

Une autre façon de faire progresser votre enfant est de partager, avec lui, les choses que vous aimiez faire à son âge. Racontez-lui votre enfance : comment était l’école, il n’y avait pas d’ordinateur…

Valérie Chéenne, pour l’association OZE