Comment faire dormir votre nourrisson ? Réponse d’une psychomotricienne

Salut les Semeurs ! Pour traiter ce thème du sommeil du nourrisson, j’ai la joie d’accueillir Carole Coenen, kinésithérapeute et psychomotricienne. J’ai été séduite par sa vision de l’enfant et de sa bienveillance envers les familles. Je me retrouve beaucoup dans ses valeurs. J’ai voulu l’inviter sur le blog car elle est pleine de bons conseils et d’enseignements !

Je l’ai interrogée sur une question que je pensais avoir réglée, mais au long de mes recherches je me suis rendu compte que pas du tout : comment coucher mon nourrisson ? Je pensais que je faisais ça très bien car j’ai investi dans un cocoonababy. Pour me laisser entendre dire que finalement ce n’était peut-être pas si bien que ça…

 

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Alors pour commencer, les bébés ont besoin d’être entourés ! Mais qu’est-ce que ça veut dire, finalement, « être bien entouré » ? Pourquoi nos petits éprouvent-ils ce besoin ?

In utero

C’est tout simplement lié à la naissance ! Le nourrisson quitte l’utérus maternel : un milieu confiné et rempli d’une substance liquide dans laquelle il baigne, tout à l’étroit et replié sur lui-même, dans l’obscurité. Tout son corps est alors en contact avec le liquide utérin porté par celui-ci. Et, dès qu’il fait ne serait-ce qu’un mini mouvement, il touche, frotte ou cogne les parois de l’utérus. Pour le bébé c’est tout à fait normal. C’est la seule chose qu’il ait jamais connue. C’est la seule expérience de son corps qu’il ait jamais vécue !

Rencontre avec la gravité

Ensuite la naissance le propulse dans notre monde terrestre. Et là c’est tout l’inverse ! Bébé découvre un nouveau milieu : ouvert, espacé, rempli d’air et froid, lumineux et bruyant. Et la plus grande nouveauté c’est la force de gravité ! Tout d’un coup son petit corps n’est plus soutenu par un chaleureux liquide. Mais écrasé par la pesanteur

Les angoisses corporelles archaïques

Ce sont les sensations ressenties par bébé qui le renseignent sur son corps. Et j’imagine que tu rends bien compte que c’est complètement différent tout d’un coup. Dans le ventre de Maman, il avait l’impression d’avoir un corps « infini » qui se confondait avec le sien. Et le voilà maintenant confronté à des nouvelles sensations qui le laissent à penser qu’il aurait finalement un corps à lui. Un corps beaucoup plus petit. Avec une frontière bien délimitée qui lui envoie des sensations pas toujours agréables comme le piquant, le froid, le dur… Et en plus c’est impossible de bouger aisément dans ce nouveau monde. Il faudrait beaucoup plus de force qu’il n’en a pour se mouvoir et aller à l’encontre de la pesanteur qui l’écrase vers le bas. Pas facile à digérer tout ça, ça va prendre du temps !

C’est ce que les psychanalystes appellent les angoisses corporelles archaïques du nouveau-né. Un passage obligé pour tous les nourrissons qui doivent apprendre qu’ils ont un corps et comment celui-ci fonctionne.

 

Mais alors c’est bien le cocoonababy ? Puisque les bébés y sont installés dans une position proche de celle qu’ils prenaient dans le ventre de leur mère ! Ça doit les rassurer non ?

Oui car les nourrissons ont effectivement besoin d’être rassurés par rapport à ces nouvelles sensations qu’ils éprouvent dans notre monde aérien. Pour développer leur sentiment de sécurité. Mais ils ont surtout besoin d’intégrer ces sensations et de se les approprier pour apprendre à connaître leur corps et leur nouvel environnement !

L’entourage affectif d’abord

Et il y a d’autres moyens de rassurer bébé qu’en essayant de gommer ou de supprimer lesdites sensations… On dit d’ailleurs que la mère construit une enveloppe autour de son nourrisson. Pour l’aider à traverser ses angoisses corporelles et intégrer ce qui lui arrive. C’est sa voix, sa présence, son odeur, son toucher, la manière dont elle va le porter, le serrer contre elle, le manipuler avec douceur, le bercer, le nourrir…

Car c’est bien dans la RELATION que le nourrisson va trouver sa sécurité, la vraie. Celle qu’il doit construire au fond de lui pour s’autonomiser. Et non grâce à du MATÉRIEL qu’on disposerait autour de lui.

Bien sûr, tout le matériel qui fait cocon autour du bébé peut aider : les couvertures d’emmaillotage, les doudous, les vêtements portant l’odeur des parents et même le coussin d’allaitement qu’on peut utiliser pour l’encercler de manière contenante.

Découvrir son corps

MAIS, car il y a bien un mais ! Outre la présence bienveillante de ses parents qui sont là pour le rassurer, le nourrisson va bouger pour développer son sentiment de sécurité. En effet, c’est en bougeant qu’il pourra découvrir son corps. Pour le comprendre et se rassurer par rapport à ses angoisses de nouveau-né ! Il va découvrir qu’il a un corps, déjà, bien séparé de celui de sa maman. Que ce corps comporte des bras et des jambes, musclés et articulés. Et qu’il peut commencer tout doucement à se mouvoir selon ses propres désirs…

C’est ainsi qu’il comprendra qu’il est une personne à part entière. Avec des émotions et un vécu à lui. Et bref, tout le développement psychomoteur qui s’en suit ! C’est un long processus qui commence à partir de l’âge de 6 mois, fin théorique de la période de fusion mère-nourrisson. Et qui s’harmonise jusqu’à 6-7 ans, âge où le schéma corporel de l’enfant est parfaitement établi.

Le cocoonababy

Donc pour en revenir au cocoonababy : la position dans laquelle bébé s’y installe est très rassurante. Car elle est proche de ce qu’il vit dans le milieu utérin. C’est une position enroulée avec un soutien de la tête et du bassin. Par contre, elle ne lui permet pas d’expérimenter le milieu aérien librement. En effet, elle empêche le déploiement de la motricité réflexe, désordonnée et un peu brusque qui caractérise tout nouveau-né. D’un côté c’est pratique. Car les mouvements réflexes (comme le fameux réflexe de Moro) peuvent réveiller brusquement un bébé qui dort. D’un autre côté, c’est cette motricité réflexe qui va progressivement s’organiser. Avec la maturation du système nerveux, pour permettre la motricité volontaire. Et ces réflexes, mêmes s’ils sont brusques, renseignent le nourrisson sur son corps. Et l’aident donc à le comprendre !

À mon sens, ce type de matelas est très intéressant pour les bébés prématurés qui ne sont pas encore neurologiquement prêts à affronter notre monde aérien. Et pour les tous premiers jours de la vie des bébés nés à terme, pour favoriser une transition monde utérin/monde aérien en douceur. Mais il ne devrait pas être utilisé au-delà du 1er trimestre.

 

Et donc, comment faire dormir bébé alors ?

Tout simplement à plat, sur un matelas bien ferme. Car il a besoin d’appuis fermes et précis qui envoient à son cerveau des informations sensorielles claires sur son corps. Et ces appuis fermes lui permettront également de développer sa motricité ! Et oui, même tout-petits, les bébés bougent dans leur lit pendant leur sommeil. Tout ça s’organise et s’intègre pendant qu’ils dorment !

Pour l’aspect « cocoon » et rassurant, il y d’autres façons de faire que les matelas préformés, les tours de lit et les montagnes de coussins disposées dans les lits des bébés…

Attention danger pour le nourrisson !

  • Les tours de lit sont à éviter car ils ne permettent pas une bonne circulation de l’air. Il pourra ainsi faire facilement trop chaud ou trop froid à hauteur de bébé. De même si un nouveau-né se retourne dans son sommeil sur le ventre et se retrouve bloqué la tête contre le matelas et le nez enfoui dans le tour de lit sans pouvoir retourner sur le dos, il y a des risques d’étouffement. Donc les tours de lit ne servent vraiment à rien et sont à proscrire !
  • Idem pour toute autre méthode qui viserait à diminuer la taille du lit. Comme un coussin d’allaitement qui serait disposé autour du nourrisson. Pour les mêmes risques d’étouffement !
  • Tous les matelas préformés comme le cocoonababy (ou le coussin d’allaitement sur lequel on déposerait bébé pour dormir) sont également à éviter à partir de 3 mois. Car ils enferment bébé dans une position dont il ne peut sortir librement.

Les préférences de Carole

  • Préférez plutôt un lit plus petit (un side-bed ou lit de cododo pour les premiers mois)
  • Ou tout simplement une peau d’agneau disposée sur le matelas d’un lit plus grand ! La peau d’agneau lui assure un contact doux et chaud. Tout en remplissant l’espace dans un lit trop grand. Elle aide également à réguler la température corporelle, que ce soit l’été ou l’hiver.
  • Privilégiez également une gigoteuse à sa taille. Dans laquelle il pourra bouger à son aise tout en touchant le bout avec ses pieds pour sentir les limites de son corps.
  • Rajoutez éventuellement une petite veilleuse à la lumière douce et tamisée. Ainsi qu’une boîte à musique chaleureuse.

Toutes ces petites attentions seront suffisantes pour qu’il se sente « entouré » et rassuré pendant la nuit !

 

À propos de lit, que penses-tu du lit à barreaux ? Existe-t-il des alternatives ?

La stigmatisation du lit à barreaux

nourrissonArrêtons de stigmatiser ce pauvre lit à barreaux ! Ce n’est pas une cage comme le dénoncent les « extrémistes » de la motricité libre… Justement, ces barreaux jouent également un rôle dans l’entourage sécurisant. Ce qui permet au nourrisson de se sentir contenu. Car ces barreaux délimitent l’espace (je dis bien l’espace, et non le corps du bébé). Et l’empêchent donc de tomber tout en lui permettant d’avoir un accès visuel à son environnement immédiat. Il peut également s’y agripper.

Un lit au sol, tel que préconisé par la pédagogie Montessori, est très intéressant pour développer l’autonomie de bébé. Mais il n’est à mon sens pas suffisamment contenant. Du moins dans les débuts de la vie. Il peut par contre être proposé dès que l’enfant se déplace à 4 pattes.

Le lit à barreaux évolutif

En ce qui me concerne, j’ai choisi un lit à barreaux évolutif pour ma fille. Il peut descendre à ras du sol (10 cm). Quelques barreaux sont amovibles pour y intégrer une petite entrée avant de retirer carrément tous les barreaux pour le convertir en grand lit classique. Jusqu’à présent, les barreaux y sont toujours car ma fille a toujours besoin de se sentir contenue, cadrée et rassurée par leur présence pour dormir paisiblement. Mais d’ici quelques mois ils seront retirés pour lui permettre d’entrer et sortir de son lit de manière autonome.

Chaque parent et chaque nourrisson est unique !

Je précise que ce n’est que mon avis personnel et qu’il en existe des différents voire même des contraires sur la toile. À chacun de prendre ce qui lui semble le plus juste pour SON nourrisson ! Tous sont différents et tous n’ont pas les mêmes besoins. Surtout en termes de réassurance affective !

 

Je remercie très chaleureusement Carole d’être venue déposer sa parole éclairée sur le blog. J’espère que cela vous aura apporté des éclairages sur la façon de faire dormir votre bébé.

Vous pouvez retrouver Carole Coenen sur, son blog et sa page Facebook. N’hésitez pas à la suivre pour recevoir plein d’infos très utiles comme par exemple « Bien choisir les premières chaussures de votre enfant ».

 

Sarah ROUYER pour l’Association OZE

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